mardi 15 mai 2012

Chap. 3 - Belami et Belami : les deux en font une de ces paires !




La revue de Belami était vendue chaque semaine à deux cents cinquante mille exemplaires et proposait, en plus des programmes télé détaillés, des articles sur des sujets de société, la vie des connards starisés du moment, des mots croisés, des recettes de cuisine et des conseils beauté. Il me payait bien, c’était pour ça que je ne pouvais pas l’envoyer se faire foutre à chaque fois qu’il me suggérait des articles bidons. Il disposait de toute une batterie de psychosociologues qui lui indiquaient les tendances du jour, à vrai dire, il ne jurait que par eux, et ce qu’ils disaient ne pouvait être ni critiqué, ni remis en cause. Alors, ceux qui, comme moi, vivaient en grande partie de Belami, adoptaient un profil bas et lui pondaient des articles destinés à parfaire la culture de son lectorat. Un article de fond tous les quinze jours, c’était pas la mort ! Y avait même des fois où il nous offrait un petit voyage afin d’aller s’informer sur place. On se barrait à deux, avec un photographe, on s’en mettait plein la panse, on baisait tout ce qu’on pouvait attraper et on revenait. Trois jours après, il avait son joli article de huit ou dix pages avec photos, flambant neuf. Belami était content, nous aussi.

Belami avait deux grands défauts : une femme frigide et son rendez-vous dominical, à dix heures trente, pour assister à la messe. Pour le premier, j’avais pu vérifier que la frigidité de sa femme n’était que l’incapacité de Belami à lui donner envie de ne plus l’être. Pour le second, qu’il fallait, malheureusement pour lui, mettre en relation directe avec le premier, je ne pouvais rien. C’était pas un mauvais bougre, mais l’orientation de sa revue hebdomadaire côté rombières et culs-bénits donnait la gerbe. Surtout pas de gros mots, hein, Monluc, surtout pas de gros mots ! qu’il m’assénait à tout bout de champ. Non, mon pote, les gros mots, je les garde pour ta femme, la prochaine fois que je la sauterai !



Belami était une sorte de moraliste qui n’utilisait les gros mots que lorsqu’il parlait avec moi. Que sa femme se trouve là au moment où nous avions une conversation téléphonique et ses yeux roulaient de ses fureurs à faire implorer le pardon au pécheur le plus corrompu. C’est la raison pour laquelle on ne se parlait généralement que tard le soir, lorsqu’il savait que sa femme était en train de roupiller, un masque de beauté sur la tronche, des bigoudis dans les cheveux et la chatte en berne. Elle était pas si mal que ça, sa femme (et je sais de quoi je parle !), mais son allure de Sainte Nitouche, ses jupes droites, sa démarche de geisha, lui donnaient un air de mal baisée, de pas baisée ou d’imbaisable à faire fuir le plus nécessiteux des nécessiteux. Belami avait quand même un autre problème : sa femme détenait quatre-vingts pour cent des parts de la revue et lui, il n’en était que le directeur exécutif. Ça le rendait malade, et y avait de quoi, rien n’était écrit ni publié sans le consentement de sa frigide (pour lui, le con !). Moi, je m’étais demandé plusieurs fois pourquoi ils continuaient à me faire bosser pour eux. J’ai un pote qui avait essayé un jour de m’expliquer la théorie des ensembles. J’avais rien pigé, sauf une chose : un système a besoin d’un élément perturbateur pour pouvoir continuer à fonctionner. Bon. L’élément perturbateur, c’était moi, et voilà. Et pourquoi un article sur ces trous du cul de motards qui croyaient que le vent dans leur crinière crasseuse valait un shampoing ? Ben, justement ça, l’élément perturbateur. Il fallait que les lecteurs (lectrices pour la grande majorité d’entre eux) puissent prendre la mesure du danger, du mal. Je participais donc, un peu à mon insu, à la chiennerie moralisante de la revue et donnais à ces pisse-froid de grenouilles de bénitier le frisson, après ça, elles savaient où c’était bien et où c’était mal. Bordel de dieu, j’en ai écrit des articles sur les prisons, la prostitution, la drogue, l’alcoolisme, la violence domestique, le viol, les sectes, l’homosexualité, etc., etc. et etc. ! Je suis incollable sur tous ces sujets, j’ai chez moi des tonnes d’informations, des dossiers, des revues de presse, des publications en tout genre... Mais bon, c’est mon boulot, je le fais comme on veut que je le fasse, un point c’est tout. Des temps meilleurs viendront, sûr !

Sacré Belami, Pas de gros mots, hein, surtout pas de gros mots ! Que nenni ! Sacré Belami et sa frigide, elle est bonne celle-là, écoute un peu ! Je m’en vais vous narrer, cher ami, le premier (et pour le moment unique) conciliabule intime que j’ai entretenu avec votre tendre et chère épouse. Pauv’ pomme !

Il avait pas été trop difficile de convaincre María Asunción, la femme de Belami, de venir chez moi. Je lui avais tout simplement demandé d’accepter de me prêter main forte pour un article sur la prostitution en milieu carcéral, ajoutant que son style inimitable et ses évidentes qualités humaines résoudraient sans aucune peine les difficultés dans lesquelles j’étais en train de me noyer. C’était creux et con comme entrée en matière, mais très efficace. Le lendemain, à quinze heures pétantes, elle sonnait à ma porte.

- Comme c’est aimable de vous être dérangée, on aurait tout aussi bien pu se retrouver à la rédaction de la revue, je vous suis très reconnaissant de m’avoir fait une petite place dans votre emploi du temps que je sais des plus serrés.
- Mais non, voyons, cher monsieur Monluc, quand il s’agit du bien de la revue, vous savez que je suis toujours prête à payer de ma personne !

Et elle pensait pas si bien dire, la frigide de mes deux ! J’avais quand même fait un effort, tout était en ordre, j’avais même passé la serpillière, j’avais l’impression d’habiter chez un autre ! D’ailleurs, l’espèce de rhétorique dégoulinante que je venais de lui servir était aussi d’un autre, mais il fallait ce qu’il fallait, et c’était pas le moment de flancher, au contraire ! Je sais plus comment l’idée m’était venue de lui régaler une partie d’extrémité bitale (oui, je sais, c’est la deuxième fois, mais, d’abord, je fais comme ça me chante, et pis, ensuite, ça fait toujours marrer mon pote Néné dont je parlerai plus tard, alors faites pas chier !), peut-être tout bêtement pour m’amuser et pour envoyer paître cet indécrottable de Belami qui disait, quand on lui demandait des nouvelles de sa femme : Mon épouse a encore ses horribles maux de tête, notre vie de couple en souffre un peu ! Bon, par bravade sans doute, et puis tout le monde devrait savoir que les femmes frigides, ça n’existe pas, sauf pour les têtes de nœud qui ne savent pas utiliser le leur !

María Asunción avait mis à peine cinq minutes pour lire mon texte, pour me dire que je m’en étais très bien sorti et me demander pourquoi je pouvais penser que son aide me serait d’une quelconque utilité. Fallait attaquer, pas se laisser impressionner, attaquer sec ! que je me disais. Je lui ai fichu directement la main sur le cul.

- Monsieur Monluc, voyons, vous vous égarez !
- Il faut que je vous avoue un secret.
- Oh, on ne m’a jamais fait un tel affront !

Elle n’en enlevait pas pour autant ma main qui lui pétrissait l’arrière-train. Attends, ma frigide, tu vas voir encore plein d’autres choses qu’on t’a jamais faites, ça va faire sauter tes maux de tête au plafond !

- Laissez-moi vous dire combien je vous trouve séduisante, vous êtes une femme, une vraie femme, comme on n’en fait plus, et puis, je suis sûr que vous savez que vous me plaisez, et depuis longtemps !
- Voyons, Charles, je suis une femme mariée, une femme honnête, une femme fidèle, laissez-moi !

C’était gagné, je le savais, il suffisait de conclure l’intro par un petit roulement de tambour. Je lui ai soulevé la jupe, j’ai mis ma main sur sa chatte et lui ai fourré ma langue dans la bouche. Elle essayait de parler, mais avec ma langue, c’était pas facile, évidemment ! J’ai remonté complètement sa jupe, j’ai baissé sa petite culotte (de dentelle fine, quand même !) et ai introduit un doigt (le majeur, je crois). Une fois ma langue sortie de sa bouche, la seule chose qu’elle a été capable de dire a été : Oh, Charles ! Alors, en avant, à poil, puis langue-clito, puis tout le tintouin, sauf le cul, là elle était réticente, tant pis, le reste. Ça faisait longtemps que je me démenais pas comme ça, et elle en redemandait l’isalope frigide de mes deux ! Des Oh !, des Ah !, des Oui !, et puis, des Oui-oh-oui-ah-oui !, et enfin, des Charles !, Oh Charles !, Quel coquin vous êtes ! Coquin ? Moi ? Coquin, quand même, où elle était allée chercher ça, coquin, moi ! Après, quelques petits Ohlala ! essoufflés. Elle s’est recoiffée, petite culotte, soutien-gorge, pull, jupe, chaussures, et puis :

- Charles, vous avez du style !
- Trop aimable, Madame, à votre disposition.
- Charles, dites-moi, j’espère que...
- Ne vous inquiétez de rien, une tombe, croyez-moi.
- Merci.
- Y a pas de quoi. Vous pouvez compter sur moi.

Elle est repartie comme elle était venue, enfin presque, pour l’allure, pas de changement, pour le reste, ce qui se voit pas à l’œil nu, la chatte ébouriffée. On sait jamais, que je me disais, des fois que j’aurais besoin d’une petite promotion ! Mais ça serait pas du chantage, non !, ça c’est dégueulasse !, non, plutôt un échange de bons procédés et puis, si elle insistait, je pourrais lui refiler quelques tours supplémentaires de manivelle à plaisir !

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